Le caviar qui descendait des Cévennes

Le caviar qui descendait des Cévennes

Pendant que les touristes en short et sandales s’ébaudissent aux charmes du village de Saint-Guilhem-le-Désert (Hérault), les esturgeons de la Castillonne restent sourds à leurs piaillements. Ils ont mieux à faire : pondre un caviar d’exception, bio et made in Occitanie (labellisé Sud de France).

Le caviar de la Castillonne a été créé voilà quelques années par François René, ancien directeur de recherches à l’Ifremer, grand connaisseur des fermes piscicoles à travers le monde et inventeur d’une technique unique au monde d’extraction des œufs d’esturgeon par césarienne. Après les premières années de développement scientifique à proximité de l’étang de Thau, l’entreprise est désormais installée à la pisciculture de Saint-Guilhem-le-Désert, abreuvée par le Verdus, dont les eaux ultra-pures vont rejoindre la rivière Hérault. Là, dans les bassins en cascade s’épanouissent quelque 250 femelles de l’espèce Baeri (dite aussi esturgeon de Sibérie), la plus fréquente dans les élevages d’Europe. Les dernières venues ont été installées fin mai. Il ne reste plus à l’équipe de Frédéric René (le fils et patron de l’entreprise) qu’à trouver un prénom pour chacune d’elles, comme le veut la coutume à la Castillonne.

Car, on l’aura compris, les René ont pour principe de chouchouter leurs petits (gros!) poissons préhistoriques. Elevés dans un espace vital confortable (11kg de poisson par m3 d’eau contre plus de 50kg dans les élevages intensifs), nourris d’aliments bio, les esturgeons ont aussi droit à un traitement de faveur quand vient l’heure, pour eux, de livrer leur poids d’œufs de petit calibre, d’un beau brun sombre (1kg par poisson, tous les 2 ans, à partir de l’âge de 8 ans). Une anesthésie par le froid, un coup de bistouri chirurgical sous l’œil de vétérinaires, quelques points de suture et les bêtes retournent, placides, vers leurs bassins de résidence. La Castillonne est le seul élevage, au monde, à pratiquer de la sorte. Partout ailleurs, les producteurs ne s’embarrassent pas de telles délicatesses. Les poissons sont éventrés et finissent en farine pour nourrir d’autres espèces animales. « Nos conditions d’élevage, notre méthode de césarienne, tout ça, ça fait des animaux moins stressés et un caviar de meilleure qualité », résume Frédéric René. De plus, la morale est parfaitement sauve. De même que le goût. Car, plus le poisson est âgé, meilleurs sont ses œufs. En maintenant ainsi son cheptel aquatique en vie, la Castillonne promet de renversantes dégustations… dans 20, 30, 40, 50 ans et plus, durée de vie de ces poissons.

Les œufs récoltés en octobre sont salés avec retenue et affinés avec patience pour un caviar haut de gamme. Michel Kayzer, chef (deux étoiles) du restaurant Alexandre à Garons (Gard) en pense beaucoup de bien. Il voit dans ce caviar élégant, plus fondant et puissant que son homologue de la Caspienne, un faire-valoir de très haute valeur à ses recettes de poissons ou coquillages.

A 2000 € le kg, c’est pas cadeau, évidemment. Mais le caviar de la Castillonne est rare. La production 2019 a été de l’ordre de 50kg. Presque rien. Quand tous les poissons seront matures, elle devrait être multipliée par 4 ou 5. Pas beaucoup plus. A peine de quoi fournir quelques restaurants gastronomiques, quelques épiceries fines en Occitanie et servir les amateurs qui peuvent acheter cet or noir sur place, à Saint-Guilhem le Désert, ou en ligne. « On ne veut pas en faire plus », tempère Frédéric René, qui n’a pas envie de se mettre la tête sous l’eau des esturgeons. Faire peu mais faire mieux. Et prendre le temps. Chaque boîte, par exemple, porte mention du prénom de la femelle dont les œufs sont issus. En terme de traçabilité, tous les standards internationaux sont atomisés.

Afin de combler les gourmets, la Castillonne a commencé à développer une gamme de produits complémentaires conçus et préparés maison : l’anguille de Thau fumée (moelleuse et puissante), le saumon d’Ecosse fumé au thym, marjolaine, piment Niora, algue Nori et sucre roux (un feu d’artifice). Il y a aura bientôt une truite fumée et la promesse, plus tard, d’un thon rouge de Méditerranée fumé.

Caviar de la Castillonne
Avenue Saint-Benoît d’Aniane
34150 Saint-Guilhem-le-Désert
www.facebook.com/caviarcastillonne
dégustation@caviar-castillonne.com